dimanche 22 novembre 2015

Le jour où je n'ai pas peur

Face à l'horreur, face à l'atrocité, l'absurdité, l'incompréhension, la colère, la tristesse, l'interrogation, l'indignation, face au fanatisme, à la barbarie, à la haine, à l'idéologie, à la terreur, face aux amalgames, aux peurs, aux dérives, à l'inhumain ... Que dire ? Que faire ?



C'était un vendredi soir presque comme les autres. Un vendredi 13. La journée mondiale de la gentillesse. On avait invité un couple d'amis à partager avec nous la première raclette de la saison. On a rit. On a bien mangé. On a parlé de tout et de rien, de nos vies et de nos projets. Ils nous ont parlé de leur petite fille et nous de notre désir d'enfant. On a câliné nos animaux. Et puis, au moment de se coucher, Google Actu a fait retentir une petite sonnerie. Et là, je n'ai pas compris.
J'ai eu l'impression d'être projetée devant un écran de cinéma, devant un film d'action, ou plutôt de scénario catastrophe. Une sorte de Die Hard ou de Mission Impossible. Sauf que ça se passait en vrai. A quelques heures de route de chez nous. A quelques kilomètres de chez mes parents, ma famille.
Je dois l'avouer, ma première pensée a été de me demander quel avenir j'allais offrir à nos futurs enfants. Ca m'a tellement retourné le bide ... Je n'ai quasiment pas fermé l'oeil de la nuit, trop occupée à cogiter. A réfléchir à cette terreur semée depuis plusieurs années par des individus qui ont perdu leur humanité et qui ne méritent même plus d'être qualifiés d'êtres humains, mais plutôt de machines idiotes et programmées à tuer à tout prix. A réfléchir à l'Histoire. Celle que j'ai appris sur les bancs de l'école. Celle que l'on est sensée apprendre et comprendre pour éviter de refaire les mêmes erreurs du passé. Et j'ai pensé à l'Histoire qui se dessinait aujourd'hui. Cette histoire même, que nos enfants étudieront dans 20 ans, avec encore des tas et des tas de questions qui n'auront peut être pas encore trouvé réponses. J'ai, toute la nuit, une nuit cauchemardesque et perturbée, eut en tête la chanson "Un jour au mauvais endroit" de Calogero. Je crois que ça résonnait dans ma tête, en continue "Plus jamais, plus jamais, plus jamais ça !". Le réveil a été dur, car contrairement aux cauchemars, quand j'ai émergé, j'ai réalisé que rien de tout ceci n'avait été imaginé.
J'ai été submergée par l'émotion, par le nombre de victimes. J'ai eu le coeur qui a saigné en pensant à leurs familles, à leurs amis. En pensant à ceux qui restent. Ceux qui ont échappé à une telle tragédie, et tout ce qui peut se passer dans leur tête alors. Pourquoi ? Pourquoi moi ?
Je n'ai pas cherché à rester abrutie par les informations en boucle données par les média. ça ne m'intéresse pas. Je suis à la limite de l'anti-médiation dans de tels moments, je trouve cela tellement absurde ... L'info pour l'info ... même quand il n'y a plus rien à dire. Juste être à l'antenne, en édition spéciale, parler, dire des choses tellement évidentes, tellement bêtes parfois.
J'ai préféré lire quelques quotidiens, réputés pour leur sérieux.
Bien sûr, je n'ai pu échapper à l'embrasement des réseaux sociaux. Là encore, je suis assez sceptique, même si je vais, pour le moment, essayer de me convaincre qu'il y a eu plus d'élans de générosité, de solidarité et de témoignages d'amour que d'amalgames, de rumeurs infondées et de messages haineux.
J'ai été touché par la solidarité internationale. Je ne vais pas mentir. Je me suis même sentie fière d'être française, même si au fond, je trouve ça ridicule, car je n'ai aucun mérite si ce n'est celui d'être née au bon endroit. Mais dans de tels moments de choc et de douleurs, ces témoignages venus d'ailleurs m'ont fait du bien. Je trouve cependant cela trop ... Trop, je ne sais pas quoi. Injuste ? Trop "too much" ? Trop ... Et je n'ai pu m'empêcher de me révolter face à cela. Pourquoi nous ? Pourquoi, parce que c'est la France, Paris, le pays des droits de l'Homme - certes -, un pays européen, un pays développé, un pays "riche" ... pourquoi toute la scène internationale se met à chanter à l'unisson l'hymne français et revêt nos couleurs ?
Ce que nous avons vécu, et ce que nous vivons encore maintenant, des milliers pour ne pas dire plus, de personnes, le vivent chaque jour à travers le monde entier. Des personnes vivent chaque jour dans la peur de se faire pulvériser par un fou sans âme. Et tout ces drames n'ont droit qu'à quelques lignes dans la presse "encore un attentat meurtrier", relégué presque au rang de fait divers ... Alors oui, j'ai été mal à l'aise, et le suis encore, vis à vis de cet élan international.



Mais là où je veux en venir, parce qu'à force, cet article est complètement brouillon et décousu, mais un peu à l'image de la vie qui s'écoule depuis vendredi soir ... c'est que je n'ai pas peur. Je ne dis pas ça pour frimer, genre rien ne m'atteint. Ou pour faire "bien". Bien sûr qu'il y a au fond de moi des angoisses liées à cette guerre de terroristes fous à lier ... Mais je veux dire par là que même si ça s'est passé ici, sur le sol de mon pays, que ça a touché monsieur et madame Toutlemonde, que je sais que ça aurait pu m'arriver, ou à quelqu'un de très proche ... que ça n'arrive pas qu'aux autres et qu'il suffit d'être un jour au mauvais endroit ... Et bien, malgré tout ça, je ne me sens pas moins en sécurité qu'il y a 1 semaine ou 1 an. Je ne m'arrêterai pas de vivre, parce que ça voudrait dire qu'ils ont gagné. Avec ce genre d'individus, on ne peut malheureusement pas prévoir. Ils sont formatés pour tuer et mourir. Quant à moi, je suis née pour aimer et vivre. 

Alors, demain, après-demain, et tous les autres jours, tant que je serai vivante, je me lèverai chaque matin avec l'espoir. L'espoir qu'ensemble nous pouvons changer le monde et promettre un avenir meilleur à nos enfants. Et cela passe avant tout par l'éducation et la transmission de valeur. Donnons également confiance en nos enfants, pour qu'ils aient confiance aux autres et ainsi ne plus avoir peur de leur voisin, de la différence. Aidons les à accéder à la culture, aux Arts et à l'amour de l'autre. Apprenons leur à crier "Plus jamais ça" et à agir avant de laisser continuer ce que nous, pays développés, avons laissé faire pendant des années, à savoir laisser naître de telles horreurs, de tels fous ... 

Et, comme me l'a dit ma meilleure amie, quelques jours après ce tragique célèbre 13 novembre 2015, aujourd'hui, j'ai envie d'une seule chose : dire à mes proches que je les aime ... 

4 commentaires:

  1. J'ai confiance en mes enfants, je sais qu'ils aiment la vie et les autres, j'espère leur avoir donné les bonnes valeurs et les avoir suffisamment aidés à ouvrir leur cœur sur le monde qui les entoure. Mais je ne peux m'empêcher de penser à tous ces parents qui ont perdu leur enfant (à cause de ces ordures serais-je tentée de dire) et je tremble pour les miens.

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  2. Je n'ai pas de mots, ma peine est si grande devant la folie de ce monde
    Bisous

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  3. J'ai pleuré en lisant ton billet. Merci pour ces mots qui rejoignent mes pensées. Depuis ce maudit 13 novembre, je n'arrête pas de me demander qu'est-ce que nous pouvons faire pour vivre en liberté et en sécurité et comment aider ceux qui voient la guerre tous les jours. Il y a des bénévoles qui partent aider les kurdes dans leur combat contre l'EI mais je ne suis pas courageuse comme ces gens-là. J'ai pensé alors que nous pouvons simplement aider ceux qui sont près de nous, aider une association, une personne qui manque d'argent ou de chaleur humaine, un animal malade etc. Mais ton article m'a ouvert les yeux. C'est vrai que mon rôle est de donner une bonne éducation à mon enfant, à lui apprendre à être tolérant et à être heureux et à savoir rebondir quoiqu'il arrive sans faire appel à la violence. En ce moment, il y a la collecte des jouets pour les enfants des familles défavorisées. C'est une excellente initiative et nous donnerons aussi des jouets et des livres pour rendre plusieurs enfants un peu plus heureux et pour qu'ils ne se sentent pas abandonnés et à l'écart des réjouissances des plus chanceux.

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  4. Lectrice discrète de longue date, j'avoue que tous ces mots très moralisateurs jetés bien à l'abri derrière un clavier sonnent faux et manquent un peu d'humilité.

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