mardi 15 mai 2018

Le jour où on explique l'adoption à nos proches

Nous avons toujours été soutenus par nos familles et nos proches amis concernant notre projet d'avoir des enfants, que ce soit à travers notre parcours en PMA ou quand nous avons décidé d'entamer les démarches en vue d'une adoption. 
Toutefois, nous nous sommes vite aperçu que nos proches avaient parfois certaines idées reçues sur le sujet ... Entre ceux qui n'imaginent même pas qu'une FIV puissent ne pas fonctionner, ceux qui s'imaginent que l'obtention de l'agrément signifie que l'enfant va arriver dans les semaines à venir ... 



Nous avons eu envie de commencer à préparer nos proches à la spécificité de l'adoption. 
L'adoption n'est en rien une bonne action, un geste magnifique etc ... même si c'est l'image véhiculée par la société. La parentalité par l'adoption est un processus et ne va pas toujours de soi, même quand on le désire le plus fort possible. D'ailleurs, de nombreux parents vivent un moment de dépression à l'arrivée de l'enfant tant attendu. Car justement,  cet enfant est souvent très, trop attendu. Et par l'entourage aussi. 

Ainsi, nous avons très vite abordé le sujet, notamment avec nos parents qui bien entendu, trépignent d'impatience à l'idée de devenir grands-parents. Nous leur avons expliqué comment allait se passer l’apparentement : un appel du service de l'aide sociale à l'enfance pour nous informer que le conseil de famille nous a choisi pour nous confier un bébé en vue d'une adoption. Ensuite, viendra un temps de rencontrer avec les professionnels pour qu'ils nous parlent de l'histoire de ce bébé. En effet, même âgé de 2 mois, ce bébé aura déjà une histoire et il est important d'en tenir compte dans la construction de son identité. Enfin, il y a aura la fameuse rencontre, la phase d'apparentement au sein de la pouponnière. Cette période dure environ 8 à 10 jours. Nous serons hébergés sur place et serons auprès de notre bébé tous les jours. A la fin de cette période d'adaptation, aussi bien pour nous, jeunes parents, que pour notre enfant, nous rentrerons à la maison. 

Et c'est là où les gens s'imaginent "Happy End, ils vécurent heureux avec leur enfant". Oui, mais pas forcément. Du moins, il y aura des choses à mettre en place. Parce que cet enfant, on aura beau l'avoir attendu pendant des années, et l'aimer de tout notre coeur ... Il y aura ce lien à créer. Il faudra qu'on s'apprivoise mutuellement, qu'il nous fasse confiance et qu'on apprenne à le connaître. Et donc, contrairement à un retour de maternité où tout le monde se presse auprès de la maman et du bébé ... il faudra que l'on construise une petite bulle rien que tous les 3. Pas éternellement, mais pendant un certain temps, pour que l'enfant se pose et se rassure. Et ça ne s'arrêtera pas là, puisque, par la suite, toujours pour que le lien se créé, nous avons averti nos familles que les soins donnés au bébé, les premières semaines, ne seront prodigués que par nos soins. C'est pour que l'attachement se fasse. Ainsi, nous serons préposés aux biberons, couches et bains ... même si les mamies mourront d'envie de donner le biberon à leur petit enfant. Ce sera non négociable et on suivra le rythme de notre bébé. Quand on le sentira serein et en sécurité, alors on pourra permettre à ce que d'autres personnes que nous le nourrissent ... 

C'est un point abordé et travaillé tout au long de la procédure d'agrément. Ce n'est ni un caprice, ni une lubie. Juste des choses à mettre en place pour mettre toutes les chances de notre côté pour que l'attachement se fasse. 




Et il en sera de même pour des tas de petites et grandes choses tout au long de sa vie. L'adoption, même si pour nous, semble naturelle, est un tout autre processus que la parentalité biologique. Il ne faut pas l'oublier et ainsi, les choses se passeront, en effet, le plus naturellement possible. 
Nous avons également fait le choix de ne pas révéler l'histoire de notre bébé adopté, sauf s'il y a une information importante à prendre en compte quand on est auprès de lui. Cette histoire lui appartient et s'il veut en parler à notre famille, nous attendrons que cela vienne de lui. Les gens n'auront pas besoin en effet de savoir si cet enfant est issu d'un viol ou si sa mère de naissance a déjà d'autres enfants. Ils n'auront pas besoin de savoir qu'il est né suite à un déni de grossesse ou que sa mère n'a pu le garder à cause d'un conjoint violent. Ils auront juste besoin de l'aimer pour ce qu'il est. Il nous parait essentiel de respecter cette intimité. L'abandon, même à la naissance, est déjà une terrible épreuve en soi. Pas besoin de rajouter par dessus le regard des autres, même s'il est bienveillant. 

Nous leur expliquons également qu'une fois le bébé confié, il n'est pas encore "à nous". L'adoption plénière n'est prononcée que dans les 6 mois ou plus qui suivent l'arrivée de l'enfant, et qu'avant cela, il y a à nouveau des rapports sociaux et cie ... afin de s'assurer que nous serons de bons parents pour cet enfant, que tout se passe pour le mieux. Il faut compter en moyenne une année avant que l'enfant soit officiellement sur le livret de famille avec sa nouvelle identité.  

Nous discutons de tout cela régulièrement, avec mon mari et avec nos proches. Ainsi, nous espérons que le moment venu, personne ne sera froissé de n'apprendre l'arrivée de notre bébé au sein de notre foyer plusieurs jours après, ou que personne ne me qualifiera de mère surprotectrice quand je refuserai de lui laisser nourrir notre enfant. 



Aujourd'hui, il n'y a qu'une chose que l'on n'ose pas encore aborder, c'est le choix du parrain et de la marraine. Car nous gardons en tête que pour le moment, ce bébé né sous X qui nous sera confié en vue d'une adoption n'existe pas et qu'il n'existera peut-être jamais. Alors, pour les protéger eux-aussi d'une déception, nous ne leur annoncerons qu'une fois l'enfant chez nous !

10 commentaires:

  1. c est tres gentil à toi de nous parler du processus d adoption, y avait pleins de choses que je ne savais pas, ton histoire est tres enrichissante, MERCI :) kiwie

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  2. C'est effectivement très instructif. Merci de prendre le temps de nous expliquer tout cela. Bises.

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  3. Ah, une question : pour le baptême, ça se passe comment? Vous avez le droit de le faire baptiser avant que l'adoption soit définitive ou il faut attendre ?

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  4. Ce moment à 3 sera nécessaire, on se régalera des photos durant ce temps. Et puis après, on aura tt le temps de le bisouiller et de le choyer cet enfant 😉

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  5. Ta profession t'a sûrement aidé dans tout ce cheminement. On sent que tout est réfléchi, pensé pour ne faire de mal à personne.
    Je suis admirative de votre parcours!

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  6. Ton article est très intéressant. Ayant été adoptée à 2 mois certaines choses sont restées dans ma petite tête même si ce n'est pas grand chose mais j'y tiens ! J'ai hâte de retourner au Vietnam mon pays d'origine un seconde fois !
    Gros bisous et bon courage !! <3

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  7. Merci de partager ça avec nous et surtout de nous apprendre plein de choses. Je pense que votre réflexion est mûrement réfléchi et ça tombe vraiment sous le sens. En parler avant est aussi une bonne chose pour être sur que tout se passe pour le mieux le moment venu!! Gros bisous

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  8. Ton article me permet de comprendre tout le processus, long, parfois complexe mais nécessaire; merci pour ce partage. Bon weekend !

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  9. il y a des choses que je ne savais pas comme le fait que c'est uniquement vous qui devez vous occuper du bébé les premiers temps! vous avez raison d'en parler à votre entourage car certaines choses sont un peu surprenantes mais qu'on peut comprendre au final si on nous informe bien !!

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  10. Comme nous vous êtes bien préparés à l'arrivée et l'éducation d'un enfant confié en vue de son adoption. C'est exactement ça les premières semaines après il peut y avoir des exceptions. Les proches sont venus le voir mais en restant à grande distance mais au bout de quelques jours où il était là quand notre chaton a eu la gastro et que je n'allais pas fort même si ce n'était pas prévu j'ai appelé mon amie tout juste partie pour qu'elle le change car physiquement je ne le pouvais pas. Je pense que ton enfant te montre aussi ce qu'il ressent et qu'on peut faire en fonction de lui. Notre petit a je trouve toujours été souriant et en relation. Il y a d'autres bébés qui ont besoin de plus de temps, qui sont plus anxieux, ont besoin de plus de repères.
    Sur l'histoire, nous indiquons quand on nous pose la question ses origines ethniques enfin ce qui a été déclaré ou pour ceux qui nous disent "il est d'origine indienne, moyen orient, libanaise on dit "pas vraiment". Après ce qui est dit lors de l'accouchement est toujours déclaratif et peut évoluer avec l'accès au dossier CNAOP. Je ne suis pas sûre que l'ASE t'indique si cet enfant est issu d'un viol, inceste etc .... Finalement les accouchements sous X en France concernent un peu tout le monde. Sûrement qu'il y a plus de déni de grossesse en proportion mais c'est pas des situations si clauques que les gens peuvent s'imaginer.
    On nous avait conseillé de ne pas savoir cela lors de la présentation afin justement de créer ce lien d’attachement. Nous en avons su un peu et j'en suis contente car quand ensuite j'ai voulu avoir d'autres réponses, l'as ne m'a jamais répondu. On fera avec ce qu'on a et ensuite il fera ce qu'il voudra.

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